Pourquoi les médecins donnent toujours la priorité aux assurés privés (PKV)
- Florian Chiron

- 21 nov.
- 3 min de lecture
Question posée par de nombreux clients, qui en font souvent une question morale.
La surprise, c’est que les médecins sont des agents économiques comme les autres.
Et d’excellents clients des concessions automobiles et de magasins de meubles design, entre autres.
Les médecins ne sont pas des anges.
Ni des démons.
Ce sont… des entrepreneurs.
Et un entrepreneur réagit aux incitations.
Et les incitations, dans le système de santé allemand, sont brutales.
1. Comment un médecin est payé en GKV : le forfait low-cost
Pour un patient assuré public (GKV), le médecin touche :
~20–30€ la consultation,
via les Kassenärztliche Vereinigungen,
plafonné par des quotas trimestriels,
sans lien réel avec le temps passé ou la complexité.
C’est le même prix pour 5 minutes ou pour 25 minutes.
C’est le même prix pour une discussion complexe ou un rhume banal.
Résultat :
Les consultations GKV sont courtes.
Les actes complexes sont mal rémunérés.
Le volume est limité : le médecin doit passer vite au suivant.
Aucune immoralité ici.
Juste un modèle économique contraint.
2. Comment un médecin est payé en PKV : le modèle entrepreneurial
Avec un patient assuré privé (PKV), on change de planète.
Le médecin facture selon la GOÄ, avec des tarifs multipliables par 1,0 à 3,5 selon :
le temps passé,
la complexité,
l’expertise requise.
Une consultation peut donc être facturée 20€ ou 80 €, voire plus.
Sans quotas.
Sans volume imposé.
Avec reconnaissance du travail réellement fourni.
Résultat :
Le médecin a intérêt à passer plus de temps.
À proposer des diagnostics plus fins.
À s’intéresser à vous.
À vous voir… rapidement.
Ce n’est pas de l’abus.
C’est de la logique économique pure.
3. Quand les incitations décident de votre santé
Si vous payez trois fois plus un médecin pour le même acte, vous le libérez des quotas, si vous rémunérez la complexité…
… alors vous devenez sa priorité.
Pas parce que vous êtes plus “important”
Parce que vous valorisez mieux sa prestation.
Et cela a des conséquences très concrètes :
Rendez-vous plus rapides
Examens plus poussés (parfois superflus, certes)
Complications diminuées
Remise en forme plus rapide
En santé, la variable la plus sous-estimée, c’est le temps médical disponible. Car ce temps joue en la faveur du patient. Une prise en charge rapide permet un retour à la vie normale accéléré.
Le patient privé en bénéficie plus.
Le patient public… moins.
Selon différentes sources (IKK classic, Verband der PKV, tables de mortalité sectorielles), les assurés privés vivent en moyenne 5 à 7 ans de plus. C’est une corrélation, pas une causalité directe — mais l’écart existe et mérite d’être interrogé. Cet écart ne vient évidemment pas que de l’assurance : les assurés privés sont en moyenne plus aisés, mieux éduqués, moins exposés aux métiers physiques.
Mais il révèle quelque chose de dérangeant :
quand l’accès aux médecins est plus rapide, le temps de consultation plus long et les traitements plus complets, cela finit par se voir dans les statistiques de mortalité.
C’est violent, mais c’est réel.
Tant que les incitations restent les mêmes, le résultat restera le même
On peut débattre morale, égalité, solidarité.
Mais tant que la rémunération des médecins sera :
3 fois plus élevée en PKV,
sans quotas,
proportionnelle au temps passé,
… la priorité sera toujours donnée aux patients privés.
Pas par méchanceté,
par économie.
La santé n’est pas qu’une question d’idéologie.
C’est une question de design des incitations.
Et comme chaque année, les tarifs GKV vont augmenter.
Si vous vous posez la question du passage en privé, janvier est le meilleur moment pour en discuter sereinement.






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